Gena Heraty, missionnaire irlandaise en Haïti depuis plus de trois décennies, a partagé pour la première fois son récit après avoir été enlevée le 3 août dernier près de Port-au-Prince. Retenue captive pendant 27 jours aux côtés d’un enfant de trois ans, elle évoque des moments de peur intense, de privation et de violence, mais aussi de foi et de solidarité.
Dans un entretien au Irish Independent le 8 septembre, Heraty décrit l’atmosphère terrifiante de sa détention : « Certains membres des gangs prétendent servir le diable. J’avais peur qu’ils nous utilisent pour un rituel ou un sacrifice. » La missionnaire raconte avoir subi des violences physiques et verbales, notamment des coups à l’aide d’une ceinture. Pour protéger l’enfant présent avec elle, elle se plaçait entre lui et les agresseurs, priant pour que les coups l’épargnent.
Les conditions de captivité étaient extrêmement difficiles. Les otages n’avaient droit qu’à un petit gobelet de riz par jour et devaient le partager avec l’enfant. L’accès à l’eau potable était limité et la pièce où ils étaient enfermés, humide et insalubre, laissait peu d’espace pour dormir. Malgré tout, Heraty puisait dans sa foi et dans la mémoire de figures historiques irlandaises pour garder espoir : « Je me souvenais des souffrances de nos ancêtres et des résistants comme Bobby Sands. »
Un moment de réconfort reste gravé dans sa mémoire : le jour où l’enfant a crié en voyant un mur : « Gena, il y a la Vierge Marie ! » Elle y a vu un signe d’espoir, renforçant sa détermination à rester forte face à l’épreuve.
Heraty insiste sur le fait que son engagement envers Haïti n’a pas faibli. « Ces gangs m’ont volé un mois de ma vie, mais pas ma volonté de faire le bien. » Elle exprime également sa colère face à l’attaque menée dans un centre accueillant des personnes gravement handicapées, un événement qui a coûté la vie à une résidente âgée, Yvonne.
Malgré l’horreur de l’expérience, Heraty refuse d’être perçue comme une héroïne : « Les chefs de gangs sont eux-mêmes prisonniers de leur mentalité. Mon courage n’est pas extraordinaire ; je n’ai fait que ce qu’il fallait pour protéger l’enfant et les autres. » Elle attribue aussi sa résilience à son identité irlandaise : « Les Irlandais ne s’apitoient pas sur eux-mêmes, nous avançons. »
Aujourd’hui, elle se dit en bonne santé, reconnaissante pour le soutien international et résolue à continuer son œuvre auprès des enfants et de la communauté qu’elle sert depuis plus de 30 ans.
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