En Haïti, l’enfance vit au rythme des violences armées. Plus de 680 000 enfants ont été contraints d’abandonner leur foyer, selon un rapport publié mercredi par l’Unicef. Ce chiffre, presque deux fois supérieur à celui de l’an dernier, témoigne d’une crise humanitaire hors de contrôle, dans un pays où les gangs étendent chaque jour un peu plus leur emprise.
Les enfants constituent plus de la moitié des 1,3 million de déplacés internes recensés à travers le pays. Arrachés à leurs quartiers, ils survivent dans des abris précaires, des écoles transformées en refuges ou des bâtiments délabrés, souvent privés d’eau potable et de structures sanitaires. Ces conditions favorisent la résurgence de maladies infectieuses comme le choléra, déjà signalé dans plusieurs sites d’accueil surpeuplés.
Dans les zones les plus touchées, l’accès à l’éducation, à la santé et à la protection s’est effondré. « Pour les enfants en Haïti, cette accumulation de crises est synonyme de lutte quotidienne pour la survie, d’écoles fermées, d’hôpitaux débordés et d’enfances écourtées par la violence, la négligence, l’exploitation et la faim », souligne l’Unicef. Chaque jour, des milliers d’enfants affrontent la peur, la faim et l’incertitude comme unique horizon.
L’agence onusienne insiste : les enfants ne sont plus de simples témoins du chaos, mais en deviennent les premières victimes. Dans plusieurs zones de Port-au-Prince et de l’Artibonite, des mineurs sont exposés à des violences sexuelles, au trafic, au travail forcé ou à l’enrôlement dans des groupes armés. Certains, encore à l’âge de l’école primaire, servent de messagers, de guetteurs ou de porteurs d’armes — un cycle de brutalité qui brise toute perspective d’avenir.
Le rapport met également en lumière la déscolarisation massive qui mine la jeunesse haïtienne. Un enfant sur quatre n’a plus accès à l’éducation, conséquence directe de la fermeture de milliers d’écoles en raison de l’insécurité. Cette rupture du lien éducatif, selon l’Unicef, accroît le risque de marginalisation et ouvre la voie à une génération entière piégée entre la peur et la pauvreté.
Face à cette détresse, Roberto Benes, directeur régional de l’Unicef pour l’Amérique latine et les Caraïbes, appelle à une action immédiate. « Haïti est au point de rupture. Il est clair que cette génération ne peut pas continuer à attendre de l’aide », avertit-il. L’agence exhorte la communauté internationale à agir sans délai, avant qu’une crise déjà dramatique ne scelle définitivement le destin d’une jeunesse condamnée à grandir dans le déracinement.
0 Commentaire