Le décret électoral de 2025, dans son article 52, introduit une disposition majeure dans le paysage politique haïtien : toute personne sanctionnée par le Conseil de sécurité des Nations unies est automatiquement exclue du processus électoral. Qu’il s’agisse du droit de vote ou de l’éligibilité à une fonction publique, ces citoyens perdent toute capacité de participer aux élections, qu’elles concernent la présidence, le Parlement, les collectivités territoriales ou les structures locales comme les CASEC.
En Haïti, près d’une dizaine de personnalités sont actuellement visées par des sanctions internationales. Elles sont accusées, selon différents rapports, de corruption, de soutien à des groupes armés ou d’atteintes graves aux droits humains. Le décret les place donc en situation d’incompatibilité totale avec toute démarche électorale, conformément à l’article 52 qui inclut explicitement les individus sanctionnés par le Conseil de sécurité parmi les personnes privées de capacité électorale.
Cette décision, saluée par certains acteurs de la société civile soucieux de moraliser la vie publique, met toutefois en lumière une contradiction flagrante.
Malgré la gravité des accusations retenues contre ces personnalités, la justice haïtienne n’a, jusqu’à présent, engagé aucune action à leur encontre.
Aucun mandat d’amener, aucune instruction judiciaire, aucune poursuite formelle n’a été lancée pour clarifier leur situation ou confirmer les éléments qui ont motivé les sanctions internationales. En pratique, ces individus continuent de vaquer librement à leurs occupations, conservent leurs réseaux d’influence et demeurent intouchables sur le territoire national.
Ce décalage entre les sanctions étrangères et l’inaction de la justice locale alimente un débat brûlant : comment espérer des élections crédibles si des personnalités lourdement mises en cause par la communauté internationale restent au-dessus de toute procédure judiciaire dans leur propre pays ? Le décret électoral tranche sur le plan administratif, mais il ne règle pas l’impunité persistante qui mine les institutions haïtiennes.
Alors que le pays se prépare à de nouvelles échéances électorales, cette absence de cohérence entre le droit et la justice pose une question centrale : Haïti peut-elle réellement assainir son système politique sans une justice capable d’assumer ses responsabilités face aux figures les plus puissantes du pays ?
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